Des armoiries et des livres

Les manuscrits de Pierre Lorfèvre

L’itinéraire du livre manuscrit, depuis sa naissance dans les scriptoria monastiques ou dans les ateliers laïques de la fin du Moyen Age, passe par les bibliothèques médiévales. A la fois lieux de conservation et de lecture, ces bibliothèques ont été le relais privilégié de la transmission et de la circulation des textes. A la fin du XIVe siècle, le livre manuscrit est depuis longtemps sorti des grands centres religieux et des cours princières qui en avaient auparavant l’apanage exclusif ; il est désormais amplement présent dans la société laïque. Déjà, les représentants du monde universitaire et savant ont recours quotidiennement aux livres pour l’enseignement et la recherche. Ils sont amenés à réunir et à tenir à jour des bibliothèques considérables.

Quand les nobles et les bourgeois, qui animent le renouveau économique des villes et des campagnes, cherchent eux aussi à se procurer des livres, ils expriment de nouveaux besoins, depuis la lecture comme activité de loisir jusqu’à l’investissement patrimonial pour des buts de reconnaissance sociale. Parfois cet investissement débouche sur un véritable mécénat culturel. En apposant des marques héraldiques sur les livres, ces possesseurs les inscrivent définitivement dans leurs patrimoines. La culture sert alors de ciment à une nouvelle classe sociale émergente et consciente d’elle-même.

Ce site est dédié à l’histoire des livres d’un chancelier du XIVe siècle, Pierre Lorfèvre. Ses armoiries, associées ou non à d’autres marques d’appartenance, permettent de reconnaître ses livres et de reconstituer sa bibliothèque. A partir de ces premières données, nous nous sommes interrogés sur son milieu, sa formation, et ses lectures.

A travers son exemple, ce site propose une initiation à la recherche en histoire du livre médiéval, à l’aide de la codicologie et de l’héraldique, sans avoir l’ambition d’offrir, à l’instar d’un manuel, un exposé complet et les outils bibliographiques et méthodologiques propres à ces disciplines.

La codicologie examine le manuscrit comme objet archéologique d’après ses caractéristiques externes : les matériaux d’écriture, le décor, la mise en page, les notes portées par ses possesseurs et lecteurs. Ces éléments permettent de rattacher les manuscrits à leurs milieux d’élaboration et de réception.

L’héraldique étudie les armoiries et les emblèmes. Elle aide à reconnaître les titulaires des armoiries qui sont placées dans les marges et dans la décoration des manuscrits et à préciser leur datation. Née au Moyen Age dans les champs de bataille et dans les tournois, elle fait appel à des couleurs vives et des formes simples pour identifier les combattants et les chevaliers d’après les armes figurant sur leurs écus et drapeaux. Phénomène de société, elle est marque d’identité d’abord pour l’individu, puis devient progressivement héréditaire, ce qui la distingue d’autres systèmes emblématiques. La transmission familiale lui assure ainsi sa pérennité. Le port des armoiries n’est pas réservé à la seule noblesse. Dès le XIIIe siècle, leur emploi s’étend aux personnes civiles (femmes, ecclésiastiques, bourgeois, artisans voire paysans) et à différentes personnes morales (villes, corps de métiers, communautés civiles et religieuses).

Voir Bibliothèques actuelles

Pour citer cette page : D. Nebbiai, H. Loyau, P. Barasc, C. Gadrat, eds, Des armoiries et des livres. Les manuscrits de Pierre Lorfèvre, Paris-Orléans, IRHT, 2010 (Ædilis, Publications pédagogiques, 7). [En ligne] http://lorfevre.irht.cnrs.fr/introduction.html